Au début des années 1900, pour passer le mur des 200 km/h, des monstres de la course automobile sont construits. Équipés d’énormes moteurs, pilotés par des casse-cous, certains existent encore de nos jours.

 

 

La Darracq V 8

Fabriquée en 1905 par Ribeyrolles, sur la base du type MM, quatre cylindres de 11 259 cc, elle participe à la Gordon Bennett, aux coupes Vanderbilt, au circuit des Ardennes, et est détentrice d’un record à 106 m/h (170,59 km/h).

 

La version MM quatre cylindres.

La décision est prise, pour réussir à passer les 200 km/h, il faut un gros moteur !

 

Darracq V 8.

 

 

Pour un gros moteur, c’en est un ! Constitué de deux blocs de quatre cylindres culbutés en provenance de la MM, alésage 140 mm et course de 170 mm. Ils sont reliés par un carter inférieur en alu, un vilebrequin est fabriqué. L’angle d’assemblage du V 8 est a 90°, la distribution est à soupapes en tête, l’allumage se fait par Magneto Nieuport et deux carburateurs Darrac. un embrayage à cônes, une boite de vitesses à deux rapports et une transmission par arbre complètent le tout.

 

 

 

 

 

 

 

Pistons en fonte de 140 mm de diamètre, régime maxi du V8 1200t/min, ils sont reconstruits en aluminium, plus léger.

 

Embrayage à cône, technique classique de l’époque.

Le freinage est sur les roues arrière, suspensions par lames de ressort, le réservoir d’essence est à l’arrière, la pompe de mise en pression est à portée de main du mécanicien. Le tout est posé sur un robuste châssis en acier ; pour gagner du poids, il n’y a pas carrosserie.

 

 

Résultat 200 CV à 1200 t/min ! La voiture est prête en décembre 1905, l’aventure commence sur une belle ligne droite (en terre) entre Salon et Arles la vitesse atteinte est de 109,65 m/h (176,464 km/h), malgré le froid qui bride le moteur…

Hémery et son mécanicien Demongeot sur la route de Salon.

Direction les Amériques, du 20 au 27 janvier 1906, pour la semaine des records sur la plage de Ommand Beach, mais le mauvais temps et des tempêtes bouleversent le programme. Victor Hémery effectue une tentative sans autorisation des officiels, résultat les temps ne sont pas retenus et Victor hérite de son surnom de « ’Surly one » ou homme hargneux au « caractère poivré » en s’engueulant copieusement avec tout le monde. On le met à l’écart, il aurait incendié volontairement le stand de Stanley avec ses échappements !

Louis Chevrolet le remplace, établit un 189,98 km/h. Comme il trouve la voiture dangereuse, il demande une augmentation de salaire qui lui est refusée. Marriot lui succède et atteint les 196,2 km/h. Mais c’est le discret Demongeot qui atteint 197 km/h, la barre des 200 km/h n’est pas tombée !

 

 

La Darracq est vendue à Algenon Lee Guiness (ALG) qui effectue des tentatives de records de vitesse sur la plage d’Ostende (193 km/h). Il gagne la course de côte de Gaillon. En 1956, Gérard Firkins, grand amateur de Darracq, récupère le moteur et quelques pièces abandonnées au fond d’un hangar et commence la reconstruction de ce monstre.

Mark Waker l’achète, termine les réglages et la mise au point et l’engage dans de grands événements historiques.

 

 

 

Première remise en route, il a fallu l’aide d’un tracteur pour lancer l’énorme moteur.

 

Ça fume un peu, tant que ça fume c’est qu’il y a du graissage !

 

Maintenant, elle démarre à la manivelle, comme à l’époque, mais il faut la technique !

 

Tout feu tout flammes, on comprend comment V. Hémery a incendié le stand Stanley.

 

Nombreuses expositions pour la Darracq reconstruite (Rétromobile).

 

 

 

Roulages

 

Tranquilles sur la route.

 

En circuit, Mark Walker, habitué des monstres, n’hésite pas à la pousser au maxi, les grandes glissades des quatre roues sont courantes avec lui.

 

 

 

Une Darracq, ça se pilote comme une Simca Rallye… c’est facile !

Et crac boum hue, ça explose !

 

 

Ce n’est pas bon quand les photographes se précipitent.

 

 

Résultat, le moteur a été entièrement reconstruit et gronde de nouveau.

Dessins d’ambiance de Marjoram

 

Victor Hémery

 

 

Pour conduire ces engins à 200 km/h pratiquement sans freins, sur des suspensions de charrettes, à peine assis sur un banc, sans aucune protection, il fallait des pilotes hors du commun. Victor Hémery en fait partie. Comme beaucoup de pilotes de cette époque, il vient de l’atelier, passant de la lime au volant.

Il est né en 1876 à Sille-le-Guillaume (Sarthe). À 13 ans, il commence des études de mécanicien au collège technique du Mans, brillant élève, mais mauvais caractère, aux USA on le surnommera The Surly one (l’homme hargneux). Ses querelles et engueulades avec les organisateurs seront si fréquentes qu’on l’isolera pour éviter d’autres incidents.

  • À 17 ans, il est embauché chez Bollé comme mécanicien et dessinateur.
  • 1895, entré chez Darracq, il est metteur au point et essayeur.
  • 1902, ce sont les premières courses et les premières victoires.

 

 

  • 1905, premiers records de vitesse, campagne de courses et records aux USA, mais suite à ses différents avec les organisateurs, il est licencié par Darracq.
  • 1907, entrée chez Benz, le 8 novembre 1909, il parcourt le kilomètre lancé à 202,7 km/h. Il est le premier homme à passer les 200 km/h en voiture à essence (une Stanley à vapeur y est parvenue en 1905).

 

 

  • Lors d’une course aux USA, il arrose le vainqueur au champagne créant ainsi une tradition désormais bien ancrée.
  • 1911, il est chez Fiat.
  • 1912, chez Lorraine Dietrich.
  • Pendant la guerre de 1914, il est responsable de parc automobile.
  • Chez Rolland Pilain, puis devient garagiste et inspecteur de permis de conduire. Il se suicide à 73 ans, une rue porte son nom à Sillé.

Le plus intrépide parmi les plus intrépides

Le pilote actuel, ou les travers de Marc Walker

C’est celui qui ose bousculer le V8, mais ce n’est pas un novice, il a mis en travers des NG, des Frazer Nash.

 

 

Panhard Levassor, là il est sage, la voiture est bien en ligne !

 

Là, il n’est pas sage et hop…

 

NG et toujours de la glisse, qui lui fournit ses pneus ?