Ferguson ? Mon voisin connaît bien, il possède encore un vieux tracteur de la marque, un « P’tit gris », pour les « bricolages » dans sa ferme, mais de là à courir en F1 !

L’industriel, Harry Ferguson, fabricant de tracteurs passionné de compétition, désireux de promouvoir la technologie de transmission intégrale de sa société, envisage de fabriquer une voiture de course à quatre roues motrices.

Bugatti avec une 4,9 l, Ferdinand Porsche avec sa Cisitalia de GP, Miller à Indianapolis ont déjà testé les quatre roues motrices en course, sans grand succès. La P99 est née de la rencontre en 1960 de Fred Dixon et Tony Rolt, intéressés par l’introduction de la transmission intégrale en course automobile. D’anciens employés de Jaguar et Aston Martin rejoignent le concepteur Claude Hill. Cooper et Lotus ont prouvé que les F 1 doivent être à moteur arrière. Cependant, pour pouvoir répartir le poids à égalité entre l’avant et l’arrière, sur la Ferguson il sera à l’avant. Il est positionné légèrement en biais, après la boite de vitesses classique. Une boite transfert envoie les transmissions vers les ponts avant et arrière, à égalité de couple 50/50. Le poste de pilotage est légèrement décalé pour laisser un peu de place à toute cette mécanique et également au pilote qu’il ne faut quand même pas oublier !

Tout l’intérêt de la P 99 réside évidemment dans sa transmission équipée d’un système « Ferguson » qui répartit véritablement la puissance disponible grâce au différentiel central à « action contrôlée », mais aussi dans son freinage à quatre disques et dans un dispositif antiblocage Dunlop Maxaret.

Mais, alors que la voiture était presque achevée, les autorités sportives décident de réduire la taille des moteurs de F1 qui passent de 2,5 l à 1,5 l. Le surpoids dû à la transmission intégrale se transforme en gros handicap. La voiture pèse 571 kg à vide, soit environ 100 kg de plus que les meilleures F1, et ce malgré l’allègement maximum et l’utilisation de métaux spéciaux. L’équipe doit adapter la voiture pour y installer un bloc standard Climax quatre cylindres en ligne 1,5 l.

L’écurie Rob Walker engage en course la Ferguson P99 pour la première fois à la British Empire Trophée de 1961, avec aux commandes le pilote Jack Farman. Après un accident, la course s’arrête pour la voiture au deuxième tour. Toujours en 1961, La P99 est alignée au GP de Grande-Bretagne, avec Farman aux commandes, mais ce dernier cède le volant à Strirling Moss dont la Lotus 18 est victime d’ennuis mécaniques. Moss remonte au classement, mais est malheureusement disqualifié au 56e tour pour avoir reçu une assistance extérieure lors d’un passage au stand. Son comportement sous vireur en entrée de courbes est largement compensé par des sorties de virages en boulets de canon, Moss en « Maître pilote » adapte son style de pilotage à cette caractéristique. Et c’est la victoire lors de sa dernière participation majeure de l’année à une course de Formule 1, l’International Gold Cup, courue sous la pluie. Moss surclasse tous ses concurrents (quatre secondes au tour par rapport aux Ferrari) et remporte la course. C’est la première victoire d’une F 1 4 roues motrices, mais aussi la dernière d’une F 1 à moteur avant.

En février 1963, un bloc Climax de 2,5 l est installé. Pilotée par Graham Hill, la voiture court en Australie, puis en courses de côte en Angleterre. Pilotée par Peter Westbury, elle remporte le championnat britannique de la spécialité en 1964.

On a revu une P 99 a la course de côte d’Ollons-Villard en 2017 où elle était pilotée par son nouveau propriétaire (merci Charles H. pour l’info)…

La P99 sert plus tard de base pour la Ferguson-Novi P104, engagée au 500 miles d’Indianapolis en 1964 et 65, mais elle abandonne.

à l’automne 2005, la Ferguson P 99 a couru au Goodwood Revival, de nouveau pilotée par Strirling Moss qui a déclaré que la P 99 était une de ses monoplaces préférées.

 

 

Harry Ferguson

 

Le fameux Ferguson « petit gris », encore utilisé.

 

 

La P 99, dernière F 1 à moteur avant.

 

 

Transmission et pilote décalés, chacun de leur côté.

 

Une P 99 roule encore en compétition historique.

 

Le Grand Strirling Moss en démonstration historique.

 

 

 

 

 

 

La monoplace s’écrase beaucoup à l’accélération.

 

 

 

Strirling Moss en action. Il croyait beaucoup au potentiel de la quatre roues motrices, en grand « Maître es pilotage », il a adapté sa conduite au sous-virage en entrée de courbes de la Ferguson.

 

 

Moyeux avants et arrières, fixations inférieures dans l’axe du cardan et très haute pour la supérieure.

 

 

La P 99 n’a obtenu qu’une victoire en GP, mais aux mains de Wesburry (pilote et ingénieur), elle a dominé le championnat anglais de courses de côte.

 

Pas d’articles Spirit Racer sans plans, et hop, les voici les voilà !

 

Complexité mécanique et poids supplémentaire sont les inconvénients des quatre roues motrices. Sur ce plan, on voit bien toute la transmission décalée sur le côté.

 

Poste de pilotage décalé à droite, l’arbre de transmission passe le long de la jambe gauche du pilote.

 

Pont avant, freins suspendus et cardans, les fixations des combinés ressorts/amortisseurs sont au-dessus de l’axe des roues.

 

Autre vue du train avant, notez le faible diamètre des arbres de cardans.

 

Le pont arrière : là aussi, freins à disque suspendus, faible diamètre de l’arbre.

 

Coventry Climax soit en 1,5 l, soit en 2,5 l, selon les versions.

 

 

 

Fergusson met à la disposition d’autres écuries de F 1 son principe de quatre roues motrices, BRM P 67, Matra avec sa MS 84, Lotus 63 ainsi que Mac Laren M9 A.

Novi Fergusson

Andy Granatelli, dirigeant de la division STP de la Studebaker Corporation, invite le « Fergie Fergusson » P99, vainqueur de l’Oulton Park, à effectuer quelques tours du mythique circuit d’Indianapolis. Le test est prometteur. Pilotée par Jack Fairman, un pilote fiable, mais pas très rapide, la P 99, malgré un moteur bien fatigué s’avère incroyablement rapide et stable dans les virages. Granatelli est séduit, il confie à Ferguson Research le mandat de construire un châssis à quatre roues motrices pour l’Indy 500 de 1964, propulsé par l’un de ses moteurs Novi V8 suralimentés installé à l’avant.

 

Deux participations à Indianapolis aux mains de B. Unser et deux abandons !

 

BRM P 67, châssis 670, P 1974.

Dessinée par Tony Rudd, pilotée par R. Atwood, les résultats sont décevants.

 

 

 

La Matra MS 84

Étudiée par Bernard Boyer, elle dispose d’un châssis tubulaire. Le moteur est à l’arrière. Voulue par J. Stewart pour les courses en conditions humides, il ne l’a pas utilisé en course (pas de pluie !), c’est J.-P. Beltoise et J. Servoz qui en héritent. Un seul classement honorable en 7e position, mais le pont avant était déconnecté !

 

Le moteur en position centrale arrière est retourné pour que la boite de vitesses soit derrière le pilote, une version MS 124 4 est envisagée, mais le projet est abandonné.

 

 

 

Lotus 63

Conçue par C. Chapman et M. Philippe, elle prend part à sept GP en 1969. Difficile à mettre au point et à conduire, c’est un échec, mais certains éléments seront repris pour la construction de la fameuse Lotus 72.

 

 

 

Turbine à gaz, quatre roues motrices, spéciale Indianapolis… un changement de règlement interdit les quatre roues motrices et… les turbines à gaz ! Bonne pour le musée…

 

Carrosserie en forme de “tube de dentifrice” pour la Lotus .

 

Mac-Laren M 9 A

 

 

Deux documents sur la Lotus et la Mac-Laren, extraits d’un ancien numéro de Sciences et Vie spécial automobile.

Sur la Lotus (plan du haut), remarquez (1 et 2) le montage de la crémaillère de direction !

 

Merci à Jean F., notre « bible de l’auto » pour le prêt de documents. Sources : Science et Vie spécial automobile et Internet.