En 1953, pour relancer son image, Bugatti décide de revenir à la compétition au plus haut niveau : la F1 de GP. L’usine est alors dirigée par Roland Bugatti et P. Marco, ingénieur et ancien pilote. Pour la construction, ils font appel à l’Italien Gioacchino Colombo qui a travaillé chez Ferrari, Alfa, Maserati et MV Augusta. La voiture est surprenante, courte et ventrue, mélange de tradition, avec ses suspensions d’avant-guerre et de modernisme par son moteur transversal central arrière et ses suspensions à basculeurs.

On peut supposer que Gioacchino Colombo s’est inspiré de la Ruggeri, monoplace à moteur transversal fabriquée à Milan, où il habitait quelques années auparavant, mais commençons par la Bug’.

Silhouette inhabituelle et moteur arrière.

 

 

Cité de l’Automobile du Musée Schlumpf de Mulhouse, à visiter au moins une fois ! La 251 y est entourée des monoplaces Gordini.

 

 

Le moteur est en travers, derrière le pilote.

 

Premières sorties

Les premiers dessins datent de 1954, puis, en juillet 1955, le passage au banc du nouveau huit cylindres en ligne révèle des problèmes de soupapes. Les premiers tours de roue se font en octobre dans les rues de Molsheim. En novembre, ce sont les essais sur l’aérodrome de Entzheim par P. Marco en personne. On annonce 250 CV pour 750 kg et 260 km/h.

Maurice Trintignant, ancien pilote de Bugatti, vainqueur des 24 heures du Mans 1954 et deux fois du GP de Monaco possède une énorme expérience. Après un passage chez Ferrari où il ne renouvelle pas son contrat, il revient chez Bugatti et fait les essais en février 1956. Des problèmes de tenue de route apparaissent, la voiture se dandine. Les pilotes Rosier et Etancelin confirment, mais Roland Bugatti persiste et conserve son train avant avant rigide de 1939 et les amortisseurs Messier, fournisseurs des… autorails Bugatti.

 

En 1955, la 251 sort le nez de son nid, elle est immatriculée en W de garage pour aller faire un petit tour.

 

P. Marco au volant, dans le centre-ville de Molsheim, escorté par une petite 4 CV Renault.

 

 

Essais

P. Marco au volant pour les premiers tours de roue sur l’aérodrome voisin, il sera relayé par Maurice Trintignant.

 

 

GP de France, Reims

À Reims, le 18 juin, une séance d’essais confirme les doutes sur la tenue de route.

Trintignant hésite entre les deux 251, châssis long ou court, il choisit le court, malgré sa tenue de route « saucisson ». Il se qualifie avec 16e place sur 18, à 18 secondes de la Ferrari de J.-M. Fangio qui passe la barre des 200 km/h (et remporte au passage les 100 bouteilles de champagne en jeu). Parmi les concurrents, on compte des Maserati 250 F, Vanwall et Gordini, la Bugatti n’est pas dans le coup, au bout de quelques tours, l’accélérateur se grippe, les amortisseurs sont H.S. c’est l’abandon !

 

La Ferrari D 50 de Fangio, carrossée spécialement pour Reims, le carénage de calandre ressemble à celui de la Bugatti.

 

Roland Bugatti présente la 251 sur la piste de Reims, beaucoup espèrent un exploit de la petite Bugatti et de Trintignant.

 

Séance de qualifications sous le regard de R. Bugatti (en jean).

 

Colombo avait débauché des meccanos de chez Ferrari.

 

Pneus Englebert, on est loin des slicks actuels.

 

 

 

Trintignant fait ce qu’il peut, mais rien à faire !

 

Après ce GP décevant, les essais continuent sur le train avant, des solutions sont étudiées, mais les budgets ont explosé, le projet est abandonné. Restent les deux voitures construites et une troisième en pièces.

Revue de détail

 

Les réservoirs de carburant sont installés de chaque côté du pilote.

 

 

 

Le moteur accouple deux quatre cylindres, et affiche une cylindrée totale de 2430 cc, 75 x 68,8. Il dispose de deux ACT, de deux bougies par cylindre, de quatre carburateurs Weber ; il développe 230 CV à 9000 t/min. Disposer de 285 CV, puissance des principaux concurrents est prévu ; une boite de vitesses à cinq rapports est étudiée par Porsche.

 

L’ensemble moteur-boite de vitesse, très compact, préfigure les ensembles moteurs-boite de nos voitures de tourisme actuelles.

 

 

 

 

Freins à tambour, des disques Messier sont étudiés.

 

La suspension arrière type De Dion et interconnexion entre droite et gauche pour éviter le roulis (il n’y a pas de barre antiroulis).

Suspensions à basculeurs et ressorts hélicoïdaux ; Bugatti, lié par contrat avec Messier, n’avait pas la possibilité de choisir ses fournisseurs.

 

 

Les dimensions :

  • empattement, 2,18 m ;
  • voie avant, 1,30 m, arrière, 1,28 m ;
  • pneus de 17 x 6 Englebert ;
  • poids, environ 750 kg.

 

 

 

Boitier de direction et ses renvois, train avant rigide comme avant-guerre, mais centrage des masses proche de l’idéal avec les reversoirs latéraux et le moteur central arrière.

 

Les renvois de suspensions à l’avant et à l’arrière, la voiture se révèle instable et manque d’amorti.

 

Châssis construit en petits tubes, réservoirs accrochés sur les flancs, passage de l’eau de refroidissement dans les tubes de châssis.

 

 

 

Version 02     

Une deuxième version est préparée, sa carrosserie est plus fine, l’empattement est allongé, les suspensions sont modifiées… Restée au stade du développement, elle n’a jamais couru.

 

Les deux 251 côte à côte aux essais du GP de Reims, après beaucoup d’hésitations, c’est la n0 1 qui sera choisie.

 

 

 

 

 

Les répliques

Comme pour toutes les Bugattis, des répliques de la 251 sont construites. Réplique de carrosserie basée sur une plateforme de Coccinelle.

 

Mannequin en bois, des feuilles de tissus polyester sont fixées dessus, puis enduites et poncées.

 

 

Réplique Neo Design

 

 

Épures réalisées avec un logiciel.

 

 

 

Répliques à l’identique

J. Barton, spécialiste de la reconstruction des Bugatti T 35 et T 50 a construit cette 251 à partir de pièces d’origine.

 

La Barton a des suspensions par lames de ressort transversales, les suspensions à basculeurs sont abandonnées, version modifiée de la 01 après le GP de Reims ? Ou suspensions type 02 ? Je n’ai pas trouvé d’explication à ce retour aux lames et amortisseurs traditionnels.

 

Même chose à l’arrière, exit les basculeurs, toujours le De Dion et retour d’une barre antiroulis.

 

 

 

Train avant à axe rigide à lames de ressort et amortisseurs, gros freins à tambour.

 

Envie de prendre le volant ? Attention, la pédale d’accélérateur est au milieu… à l’ancienne !

Ruggeri l’inspiratrice ?

Les frères Ruggeri, installés à Milan, font courir des Maserati, puis au cours des années cinquante, ils décident de construire une nouvelle monoplace. Pour se conformer à la nouvelle réglementation de cylindrée qui limite la cylindrée du moteur à 750 cc suralimenté ou 2,5 l atmosphérique, un nouveau moteur à huit cylindres en ligne de 2490 cc, 72 x 75 tout alu est fabriqué. Son montage est prévu en position arrière transversal.

Le châssis est dessiné par Arialdo Ruggeri, les réservoirs d’essence sont implantés dans les flancs de la monoplace, des suspensions à barres de torsion réglables depuis le poste de pilotage sont prévues, une carrosserie est commencée, mais les finances des frères Ruggeri ne permettent pas de mener le projet à terme.

D’après certains, elle aurait inspiré G. Colombo pour la construction de la Bugatti 251. Comme celle-ci, elle est équipée d’un huit cylindres en ligne, disposé transversalement à l’arrière, la boite de vitesses fait bloc avec le moteur, mais son châssis et les suspensions sont différentes.

 

 

Moteur transversal arrière, réservoirs de carburant sur le côté, réservoir d’huile à l’avant, châssis constitué de gros longerons, quatre roues indépendantes.

 

Le pilote peut régler les suspensions.

 

Nous n’avons pas trouvé de photos ni de dessins de la carrosserie.

 

 

 

 

 

Moteur couché à plat et boite de vitesses dans le prolongement à l’arrière.

 

Huit carburateurs Dell Orto, type moto.

 

1955, c’est l’arrêt et la dispersion des pièces ; le comte Lurani, spécialiste de voitures de collection, stocke le tout dans son musée.